Alter Paname est un des collectifs du « renouveau » de la fête parisienne (cf report d’ Utopie Tangible*). Leurs mots d’ordre: alternatif, grands espaces, scénographie, artistique, participatif, déguisements, folie; en d’autres termes : LA FÊTE !

Au travers d’une interviews placée sous le thème de « la fête avec ou sans politiques, pour vous public plus ou moins philosophe mais certes stellaire », ils nous livrent leurs motivations, nous laissent pénétrer leur monde et partagent leur philosophie.
En te souhaitant bonne lecture : fermeture du sas d’entrée de la navette, allumage des trois moteurs secondaires et du moteur principal, allumage des propulseurs et décollage !

C’est « la fête » :

Q) On parle beaucoup de fête libre, de bouillonnement, d’aventure, mais cela fait quelques années que la fête se transforme et attire de plus en plus d’acteurs. Peut-on toujours parler d’une nouvelle manière de faire la fête ?
R) C’est vrai qu’à force, la fête libre n’est plus si nouvelle 🙂 Les acteurs se sont multipliés depuis quelques années et c’est tant mieux ! Il y a presque une overdose de collectifs et événements dits alternatifs, mais c’est pour une bonne raison : le public s’élargit aussi. Donc ce fameux renouveau est en train de devenir la norme, une belle norme dont on est fiers de faire partie.
Q) Voudriez-vous avoir un lieu où tous les collectifs puissent organiser des fêtes « libres » tous les week-ends ? Pourriez-vous vous entendre avec tout le monde ? Cela est-il possible humainement ?
R) Je pense que c’est notre rêve à tous, ce lieu idéal que l’on pourrait se partager. Mais on imagine que, comme pour toute liberté, il lui faudrait des règles et une hiérarchie. Nous sommes liés, amicalement et professionnellement, avec pas mal d’autres collectifs ; organiser des fêtes ensemble, on sait faire ! Alors pourquoi pas se partager un lieu ? Le seul problème c’est que les soucis commencent dès que l’idée de possession naît. Peut-être vaudrait-il mieux ne pas posséder ce lieu finalement !

Q) Si vous pouviez faire une fête où vous voulez en Ile de France, quel lieu choisiriez-vous entre Les Invalides, Roland-Garros ou l’Arc de Triomphe ?
R) Roland Garros ! Un court, une ambiance. Des jeux, des sets et des matchs amoureux !

Q) Avec des festivals comme le Weather, ou de grosses fêtes comme PlanetOpera, peut-on encore parler d’événements intimes et chaleureux ?
R) Nous essayons vraiment de garder cet esprit oui. Même lorsque nous réunissons 5000 personnes, nous pensons réussir à préserver un côté accessible et « amateur » qui diffère d’une production « usine ». Bien sûr c’est difficile, et il faut tout de même sécuriser l’espace et le public, mais c’est un challenge qu’on commence à bien aimer. L’idéal pour nous, c’est d’alterner les gros formats qui s’apparentent à des festivals, et les événements plus petits, où on a le temps de rencontrer les gens et de faire la fête nous aussi (parce qu’on aime bien ça quand même).
Q) N’est-ce pas compliqué d’allier des têtes d’affiches internationales avec la folie de l’Alter Paname ? N’avez-vous pas peur de la perdre ?
R) C’est une question que l’on se pose à chaque fête. En plus, nous avons l’impression que notre public ne se déplace pas pour les têtes d’affiche mais pour le lieu et l’ambiance principalement. Comme pour la question précédente, nous essayons d’alterner. Nous avons déjà annoncé des événements sans jamais communiquer de line up, les deux fonctionnent ! Préserver la folie de l’Alter Paname, c’est notre but ultime ! Quand on invite une « star », on propose une projet inhabituel ou une scénographie originale, histoire que les fans soient encore surpris même s’ils l’ont déjà vu 5 fois.
Q) N’aimeriez-vous pas voir les danses de couples réinvestir nos nuits et nos journées ?
R) Pourquoi pas ! Il faudra qu’on pense à un thème « Salon » 🙂 Mais après tout, notre génération danse en couple aussi, ce n’est qu’une question de rythme et de pas, la danse à deux ne se perdra jamais. La valse du 21ème siècle c’est peut-être se regarder dans les yeux pendant un set techno ?

Chez les « Politiques » :

Q) Pensez-vous que l’élection présidentielle pourra changer quelque chose à votre manière de faire la fête!
R) À notre manière de faire la fête non. Mais à la façon dont il faut appréhender les autorisations avec les lieux oui. Il faudra composer avec ça. On peut adapter notre approche mais jamais notre esprit !

Q) Les politiques et les administrations ont-elles une forte influence sur vos choix ? Pensez-vous qu’un jour un élu viendra à l’Alter Paname ?
R) Il faudrait vérifier mais je crois qu’on a déjà eu des élus locaux pendant des teufs ! Les politiques communales influencent nos choix de lieux oui, souvent. De toutes façons, dans la culture, tout est politique, on l’apprend encore et encore. on commence à comprendre comment ça fonctionne. Ça aussi, c’est une sorte de valse 😉

Q) Si vous êtes toujours de la partie dans quelques années, le Grand Paris représente-t-il une opportunité pour vous ? Pensez-vous que cela donnera aux fêtards plus de libertés ?
R) Si le Grand Paris est un concept avec un joli nom, ça nous permet d’avoir les bons mots pour séduire les communes et les autorités. Si ça implique des changements concrets pour les transports et les autorisations alors oui c’est une belle opportunité. En tout cas nous pensons que le Grand Paris est déjà intégré dans les façons de penser de notre public.

Pour un « public » :

Q) Trouvez-vous toujours que votre public est au top ? niveau respect des lieux ? respect d’eux même ?
R) Oui, toujours, on les adore ! Il n’y a que très peu de casse, de dégâts, de malaises. Les secours soulignent toujours le faible taux de prise en charge lors de nos événements. Nous pensons que c’est dû au fait qu’on ne les vole pas avec nos tarifs, qu’on les laisse vagabonder dans de grands espaces, qu’on leur propose des ambiances différentes et qu’on ne sert que très rarement de l’alcool fort ! Il y a aussi la partie qu’on ne maîtrise pas : leur maturité et leur sens de la fête, tout ceci crée une potion magique qui fonctionne systématiquement.

Q) Beaucoup de médias spécialisés mettent l’accent sur la musique, est-ce la chose la plus importante pour vous ? N’est-ce pas la logistique et l’agencement des espace afin que le public se sente bien ? La communication pour que les gens soient chauds et déguisés ? [pas de réponse « un peu de tout » :)]
R) Nous le répétons souvent, la musique n’est absolument pas le seul élément de nos événements. Même au niveau du budget, la déco et les animations occupent une place aussi, voire parfois plus importante que la musique. Les déguisements et l’état d’esprit, on a presque plus besoin de communiquer, les gens savent qu’ils peuvent venir se défouler et s’habiller n’importe comment et qu’ils ne seront pas jugés. Le thème est juste un prétexte, le vrai thème c’est la fête.
Q) Est-ce important pour vous de connaître votre public ? Ou est-ce quelque-chose que vous ne voulez pas savoir (csp, origine géographique) ? N’est-ce pas un indicateur important pour favoriser la mixité ? 
R) Nous pensons que favoriser la mixité ce n’est pas notre métier. Nous n’analysons pas notre public et nous n’essayons pas d’avoir tel CSP ou telle origine. Tous le monde est le bienvenu, nous n’avons pas de physio, tout le monde rentre à l’Alter ! Parfois même les enfants 🙂

Q) Opterez-vous pour un tarif préférentiel aux habitués de l’alter ou privilégieriez-vous les nouveaux venus ?
R) Nous privilégions toujours le noyau dur, parce que nous avons connu des galères financières et qu’une centaine de personnes a participé à nous remettre sur pied. Ceux-là ce sont nos chouchous. C’est une forme de favoritisme peut-être mais on assume ! Bien sûr, les nouveaux sont accueillis de la même façons, il y aura des paillettes pour eux à l’entrée et il n’y a pas de carte membre ou assimilé. On garde quand même en tête que pour préserver cette folie dont tu parlais avant, il faut préserver notre public d’origine. C’est difficile d’allier cette volonté avec celle de grandir mais on y arrive, enfin je crois.

Q) Pensez-vous a une fête à prix libre ? Trop risqué ? Pouvez faire confiance à votre public au niveau financement du projet ?
R) On y a déjà pensé ! Mais certains de nos événements sont si lourds financièrement qu’on préfère ne pas risquer 😀

Plus ou moins « philosophique » :

Q) L’histoire de la fête est-elle l’histoire de la lutte des classes ?
R) On ne fait pas vraiment partie de ces penseurs de la teuf politico-techno ! Il faut lutter pour tout dans la vie, même pour faire la fête. Si on peut lutter avec classe tant mieux !
Q) La fête sans amour n’est pas toujours drôle… Mais est-ce plus drôle que l’amour sans la fête ? (d’après Georges Wolinski)
R) La fête sans amour n’existe pas ! Tandis qu’un amour platonique et non festif ça peut durer longtemps…

Mais certes un peu « stellaire » :

Q) Après Planet Opera? On fait la fête sur quelle autre planète?
R) Sur une planète où les soucis n’existent pas, avec plein d’autres collectifs.

Q) Vous seriez plus ami avec Vegeta ou Son Goku ?
R) Merde j’y connais rien à cette culture. Son Goku ça sonne mieux, même si ça doit faire mal !

Q) Pensez-vous que nous vivons sous une bonne étoile ?
R) Qui est nous ? Tout est relatif. Et l’étoile de l’autre semble toujours mieux briller que la notre. Mais si on a tous la même alors elle est un peu débordée je crois.

Leur prochain événement: “Soucis de collectifs”

Ils remettent le couvert avec leurs copains Le Camion Bazar et de SOUKMACHINES pour une grande messe de la fesse, un grand bœuf de la teuf , le vendredi 3 février de 22h à 11h. Mise en ligne des billets ce mardi 3 janvier 2017. >> https://bit.ly/2ioU7NY

* En prime, le docu “Le Renouveau”

Documentaire réalisé par le collectif Utopie Tangible sur une période d’un an, retrouvez auprès de La Ferme du Bonheur, La Mamie’s, Le Camion Bazar, Microclimat, Alter Paname, OTTO10 Events et District Factory, l’histoire du renouveau de la FÊTE parisienne. Un docu de 24 minutes 16 secondes passionnant.